Le Bitcoin est-il une valeur refuge ? Un message de CZ

2020-03-22

Après quelques interviews récentes dans les médias, j'ai décidé de partager mes réflexions sur certains sujets dans cet article de blog. Beaucoup de questions ont été reformulées. Les réponses ne sont que mes opinions personnelles et ne sont pas nécessairement fiables, si tant est qu'elles le soient. Veuillez vous en remettre à votre propre jugement. Ceci ne constitue pas un conseil financier.

Q : Avec l'effondrement des marchés internationaux, le Bitcoin n'a pas été à l'abri des pertes qui ont frappé les autres marchés. La cryptomonnaie est-elle vraiment une "monnaie de couverture", un "refuge" ou une "réserve de valeur" comme le soutiennent les cryptophiles ? Êtes-vous inquiet pour le Bitcoin ou les cryptomonnaies ?

R : Non, je ne suis pas du tout inquiet pour les cryptos. Les fondamentaux n'ont pas changé. Contrairement aux fiats (devises fiduciaires), le Bitcoin est une monnaie dont l'offre est limitée. Personne ne peut en produire davantage. La demande augmente, surtout maintenant. Tout ira bien.

Au lieu d'une vision simpliste en noir et blanc de "refuge" ou non, nous devons examiner plus en profondeur la manière dont les choses fonctionnent dans le monde réel, qui se situe généralement en demi-teinte. Il y a de nombreux facteurs et échelles de temps à prendre en compte ici, mais utilisons d'abord une analogie.

Supposons que vous utilisiez une bouée, elle fonctionne et vous aide à vous maintenir à flot dans l'eau. Supposons qu'elle soit attachée au Titanic alors qu'il coule. Cette bouée vous permettra-t-elle de rester hors de l'eau ? Non, elle n'y arrivera pas. Est-ce parce qu’elle ne fonctionne plus ? Non, les propriétés de flottaison de cette dernière fonctionnent toujours... Vous voyez ce que je veux dire.

Fondamentalement, le Bitcoin ou les cryptomonnaies n'ont pas changé. Elles fonctionnent toujours. Elles sont toujours en quantité limitée, personne ne peut arbitrairement en augmenter la quantité. Les fiats étant imprimées à un rythme record, c'est vous qui décidez de ce qui se passera, en temps voulu.

Q : Pourquoi le Bitcoin est-il descendu alors ?

R : Le Bitcoin est un actif tradé librement. Le prix est déterminé par le marché, ou les personnes collectivement présentes sur le marché, par le trading. Là encore, il y a toute une série de personnes impliquées, et de multiples dimensions que nous devons prendre en compte. Je ne mentionnerai ici que deux dimensions.

Première dimension, les inconditionnels des cryptos vs néophytes.

Il y a les inconditionnels des cryptos, dont la plupart des capitaux sont en cryptos. Ils vendent rarement des cryptos en fiats (sauf s'ils veulent les dépenser), et ils n'ont plus de fiats pour acheter d'autres cryptos même si le marché baisse. Ce groupe n'a pas beaucoup d'importance. Ils ne veulent pas/ne peuvent pas faire de trading.

Ce sont des personnes qui croient fermement aux cryptos et qui ont une part importante de leur portefeuille d'investissement en cryptos. Lorsqu'ils ont plus de fiats, ils en achètent. Lorsqu'il y a une baisse, ils achètent.

Il y a des gens qui sont relativement nouveaux dans le domaine des cryptos. Ce groupe peut ou non comprendre la technologie crypto ou y croire vraiment. Lorsqu'ils sentent qu'il y a des risques, ils vendent. Lorsqu'il y a de la panique, ils vendent.

Ensuite, il y a beaucoup de gens qui n'ont jamais touché aux cryptos. Ils ne comptent pas beaucoup non plus pour cette discussion. Mais ce sont des acheteurs potentiels pour l'avenir.

Deuxième dimension, avoir de la liquidité en réserve vs se battre pour payer le loyer.

Certaines personnes gèrent leurs finances (et leur mode de vie) de manière à avoir un peu de réserve dans leurs fonds. Lorsque leurs investissements (actions ou cryptos) baissent un peu, ils peuvent toujours payer leurs dépenses courantes. En d'autres termes, ils peuvent traverser une récession sans trop d'impact sur leur niveau de vie. En fait, beaucoup d'entre eux achètent en cas de baisse.

Il y a des gens qui dépendent des gains à court terme de leur portefeuille d'investissement pour payer leur loyer. Lorsque le marché boursier baisse, ils sont obligés de vendre des cryptos pour couvrir leurs frais quotidiens.

La proportion de chaque type d'investisseur sur le marché n'est connue de personne. Elle évolue également dans le temps. Leur force relative ou leur conviction de vente ou d'achat est également dynamique. Lorsque les bourses s'effondrent, plus de gens ressentent la nécessité urgente de se procurer des liquidités et, par conséquent, sont plus convaincus de vendre des cryptos à court terme.

La démographie et la psychologie du marché comportent de nombreuses autres dimensions, mais vous avez compris l’idée générale.

Taille

La taille est importante pour notre discussion. Le marché boursier est environ 1000 fois plus important que le marché des cryptos. Lorsque le marché boursier s'effondre, une grande partie de la valeur disparaît, souvent plusieurs fois la capitalisation totale des cryptos. C'est un peu comme si ce même Titanic coulait et que vous nagiez à proximité. L'effet d'aspiration est réel. Il vaut mieux vous accrocher à cette bouée qui n'est pas attaché au Titanic et vous finirez par remonter à la surface.

Coronavirus

La crise financière de 2008 ne comportait pas de pandémie. La dynamique et la psychologie sont un peu différentes. Avec seulement 1 personne sur 1000 qui possède ou utilise les cryptos, elles ne sont pas encore très utiles en situation de pandémie. Lorsque les gens craignent que les rayons des magasins soient vides et qu'il y ait une pénurie de nourriture, ils veulent constituer des réserves d'argent. Il y a donc une demande ou une pression accrue de la part des personnes qui veulent vendre leurs investissements (actions ou cryptos) en cash, toujours à court terme.

En théorie, le prix de l'or devrait augmenter, mais cela ne s'est pas produit non plus. Hélas, il y a d'autres facteurs : l'or est difficile à transporter, difficile à contrôler, et, comme pour le Bitcoin, rares sont les personnes qui acceptent aujourd'hui de l'or dans le cadre d'une transaction alimentaire. Il y a aussi d'autres facteurs communs, comme la "vitesse" mentionnée ci-dessous. Mais contrairement au Bitcoin, je pense que l'or est en train de perdre du terrain, alors que le Bitcoin ne fait que commencer.

Mais le côté positif, c'est que le coronavirus, aussi mortel soit-il, va passer. Un vaccin sera mis au point tôt ou tard. Bien que nous dépendions trop d'une filière d'approvisionnement internationale, qui s'est arrêtée. Aucun pays ne connaît actuellement une grave pénurie de nourriture. Au bout d’un moment, les gens qui accumulent des liquidités finiront par découvrir qu'ils n'ont plus besoin de le faire et le réinvestiront.

Q : La Fed est en train d'imprimer de l'argent, pourquoi le prix du Bitcoin n'augmente-t-il pas ? Comme on nous l'avait dit ?

R : Il y a une notion de vitesse. "Au bout d’un moment" était le mot-clé du dernier paragraphe. Les marchés sont inefficaces. La vitesse de propagation du phénomène est lente, ce qui nous offre en fait beaucoup d'opportunités.

La Fed ont annoncé qu'elle va imprimer plus d'argent, mais l'avez-vous obtenu ? Non.

Les banques l'ont-elles reçu ? Certaines oui, la plupart non.

Avez-vous déjà demandé un nouveau prêt ? Probablement pas.

Avez-vous déjà acheté une nouvelle voiture avec ce prêt ? Probablement pas.

Les gens ont-ils déjà acheté plus de Bitcoins ? Non, dans la plupart des cas. Beaucoup d'entre eux sont encore en train de paniquer à cause du manque de papier toilette.

Ces changements prennent du temps à se propager dans le milieu économique. Les changements ne se produisent pas immédiatement lorsqu'il s'agit d'une grande population.

Il y a d'autres aspects plus pratiques liés à la vitesse. En raison de l'inefficacité des transferts fiat, il faut du temps aux gens pour verser de l'argent sur les plateformes d'échange de cryptos afin d'acheter des Bitcoins. Il y a toujours un retard sur le marché.

Q : Les cryptos ne sont pas des actifs refuge ?

R : C'est à vous de juger. J'ai fait mon choix.

Quoi qu'il en soit, j'espère que vous comprenez que de nombreux facteurs entrent en jeu à chaque instant. Ne vous attendez pas à ce que le Bitcoin monte forcément lorsque l'indice Dow Jones s'effondre, ou vice versa. Ce n'est pas un actif qui présente une corrélation inverse parfaite. Si vous voulez cela, vous devriez simplement Shorter l'indice Dow Jones.

Q : Pourquoi êtes-vous toujours aussi confiant concernant les cryptos ? Quels problèmes observez-vous dans le système financier actuel ?

R : Je crois fermement que le système actuel (ou ce que j'appelle habituellement l'héritage) est en échec. Et le Bitcoin y apporte une solution.

Nous ne devons pas détester les acteurs, mais bien le jeu lui-même.

Je vais vous donner quelques exemples. Lors d'un entretien avec un analyste de Wall Street, entendez-vous des investisseurs ou des analystes demander aux PDG "avez-vous suffisamment de réserves de liquidités pour survivre à un ralentissement économique ou à une pandémie qui bloque les voies d'approvisionnement ? Ou bien vous les entendez demander "Quel est votre bénéfice ce trimestre ? Quelles sont les nouveautés ? Comment allez-vous faire monter le prix des actions, maintenant, pas la semaine prochaine, pas demain, aujourd'hui, maintenant ?

Imaginez deux PDG dans une salle de conférence. L'un d'eux dit : "Nous allons économiser 50 % des bénéfices ce trimestre pour les mauvais jours, en cas de pandémie ou de crise économique". L'autre dit : "nous utiliserons 95% de nos bénéfices ce trimestre pour le rachat d'actions. Les prix des actions vont augmenter..." Devinez qui sera applaudi et qui sera ignoré ? Et devinez ce que les PDG sont entraînés à faire ? Ils font du court terme.

Alors, peut-on blâmer les PDG ? Ce n'est pas clair. Certains de ces PDG peuvent même se considérer comme des héros, se sacrifiant (au risque de se faire virer lors d'un léger ralentissement économique), tout en "maximisant la valeur des actions" lorsqu'ils ont encore leur emploi. Ils ne mentionnent généralement pas les bonus de 100 000 000 USD qu'ils ont perçus. Mais si vous étiez à leur place, ou si vous aviez une chance d’y être, refuseriez-vous cette chance ? Feriez-vous autrement ? Il est peu probable que ce soit le cas. C'est le système qui est défaillant.

Q : Pourquoi les gouvernements persistent-ils à renflouer ces entreprises ?

R : En bref : Ça me dépasse.

Ces entreprises sont jugées trop grandes pour faire faillite. Une seule banque en faillite pourrait entraîner des pertes de plusieurs centaines de milliards de dollars pour les investisseurs particuliers. Alors, pourquoi ne pas laisser ces banques faire faillite et imprimer de l'argent pour le donner directement aux petits investisseurs qui ont perdu de l'argent ? Je suis tout à fait d'accord avec vous. Il y a de nombreuses raisons possibles qui explique cette situation.

Il est sans doute plus coûteux de le faire de cette façon. En 2008, Lehman avait une dette de 680 milliards de dollars soutenue par seulement 22,5 milliards de dollars de capital, soit un écart de 660 milliards de dollars par rapport à l'ensemble des investisseurs particuliers. Il ne s'agit que d'une seule banque, et il y en a des centaines, par pays. Dans ce contexte, il est parfaitement logique de sortir 2 000 milliards si cela peut restaurer la confiance des investisseurs. C'est le moyen le moins cher, pour l'instant, à chaque fois.

Les perspectives et les relations publiques sont également différentes. Avec une impression de l'argent, les contribuables sont volés (appauvris) indirectement, mais ils ne se plaignent pas beaucoup. Du moins, pas autant que si une banque avait fait faillite, comme Lehman, alors tout le monde sait exactement qui blâmer, quel PDG/régulateur/politicien a fait faillite, etc. En imprimant l'argent de cette manière, tout le monde sauve la face et est heureux, sauf les petits épargnants les plus pauvres. Mais ils ne sont pas au courant, n'est-ce pas, alors c'est bon.

Q : Cela ne risque-t-il pas de créer des problèmes encore plus importants à l'avenir ?

R : Et comment ! Mais c'est le problème de quelqu'un d'autre. Quelques années plus tard, un autre nigaud s'en occupera. Malheureusement, ce nouveau venu n'aura pas d'autre choix que de continuer à jouer le même jeu. Il sera aussi très bien payé, alors c'est normal.

Je reviens à la question qui était de savoir pourquoi je suis toujours optimiste quant aux cryptos.

Le Bitcoin résout ce problème. Avec les cryptos, c'est différent. Pas de renflouement par le gouvernement, du moins pas en émettant de l'argent. Cela brise le cycle. Cela ne résout pas tous les problèmes comme par magie. Les entreprises vont continuer à faire faillite, certains utilisateurs seront encore affectés. Il y a toujours une forte demande de la part des investisseurs pour des bénéfices à court terme. Certains PDG seront toujours avides de rendement à court terme appuyés par une croissance durable. Mais ces entreprises sont moins susceptibles de devenir très grandes. On ne peut pas laisser les choses se gâter.

De plus, pour les raisons ci-dessus, je me montre rarement haineux ou agressif envers qui que ce soit en particulier. Cela ne sert à rien. Lorsque vous voyez les raisons sous-jacentes, c'est le système qui les a poussées à agir ainsi.

Y a-t-il quelque chose de différent cette fois par rapport à 2008 ?

Oui, je crois qu'il y a des différences. En 2008, il n'y a pas eu de vague de pandémie qui a interrompu l'économie mondiale. Mais je crois que le Coronavirus n'est qu'un déclencheur, pas la cause première. Notre économie devrait être plus résistante, au moins assez forte pour survivre à certains chocs.

Plus important encore, en 2008, nous n'avions pas vraiment d'autre choix que d'espérer que le système à l'origine des problèmes se rétablisse miraculeusement par lui-même. Mais cette fois, les gens ont plus de possibilités.

Long Bitcoin, Short the bankers.

CZ